LE JOUR OÙ J'AI FRANCHI LE CAP HORN
(Didier BIBARD)
Ce qui suit est un extrait du journal de bord que j'ai tenu lors de mon séjour sur le porte-hélicoptères Jeanne d'Arc (la première campagne à embarquer un détachement de l'ALAT, de décembre 1992 à juin 1993). Ce jour-là, la Jeanne passait le Cap Horn... Et j'entrais dans le livre des "légendes urbaines" du navire suite à un incident cocasse, dont j'entendis encore parler plusieurs années plus tard !
Samedi 23 janvier 1993 - 47e jour
Attention, cette journée est historique : pour la première fois, un détachement ALAT va franchir le Cap Horn... et a priori en hélico !
Ce matin, à 7h, il fait 7° C. L'eau est à 8° C. Nous passons entre la Terre de feu à tribord et l'île des États à babord. D'ailleurs, vers 7h30, je sors faire quelques images... Il ne fait pas chaud du tout ! On supporte aisément le k-way fourré ! Je fais d'autres images, vers 8h, de l'intérieur cette fois.
Je vole à 11h. À 10h, donc, je monte en salle de contrôle des opérations (le CO) pour le briefing avant vol. Ce briefing est destiné à nous donner tous les éléments de la mission aérienne : fréquences, indicatifs, éléments météo, consignes et conduites à tenir... Ça dure entre 10 et 20 minutes, selon la mission. Dans cette salle, il fait sombre, avec un éclairage rouge caractéristique, et il est difficile d'identifier quelqu'un, sinon de très près. Avant de quitter le CO, je crois reconnaître le LV M. (un officier que je connais depuis la corniche, à Saint-Cyr-l’École), occupé à faire travailler quelques "Midships" (les élèves-officiers de Marine). En passant derrière lui, je lui mets une main amicale mais ferme au "panier". Je m'éloigne un peu, tout sourire, et en ouvrant la porte du CO, je me retourne pour voir la réaction de mon camarade. Horreur ! Ce n'est pas lui... Mais le pacha en personne ! Je me répands en excuses plus ou moins bafouillées auprès du commandant, qui semble rester de marbre. Je referme la porte, rejoins la salle d'alerte des pilotes. Quand j'y pénètre, tous ceux qui sont présents comprennent qu'il vient de m'arriver un "truc". À la question qui fuse alors : "Qu'est-ce qui vous arrive, Mon capitaine ?", je réponds spontanément : "Je viens de mettre la main au c... du pacha !". Hilarité générale, évidemment. Le seul qui ne rit pas, c'est moi.
Bref, le vol a lieu comme prévu. Il s'agit d'un ADEX (exercice de défense anti-aérienne), où les deux GAZELLE jouent le rôle, dans un premier temps d'avions en attaque contre le navire, dans un deuxième temps de missiles tirés depuis un navire ou un avion ennemi (véridique !). Ça dure une bonne heure. Quand je pose sur le pont de la Jeanne, ma "mésaventure" au CO a déjà fait le tour du navire...
À 13h "O", nous reculons nos montres d''une heure : il est donc de nouveau midi ("P") !
Après le repas, je monte à nouveau en passerelle. Le Cap Horn se rapproche... 13h45, poste de combat, pendant une heure. Je descends en cabine pour revêtir ma combinaison étanche. À 15h45, je décolle à bord de la GAZELLE SA342 n° 3948, immatriculée FMCYI. La Jeanne est en train de franchir le Cap Horn lorsque je décolle les patins du pont. Pendant 45 minutes, je vais passer et repasser ce cap mythique, le photographiant et le filmant sous tous les angles. C'est LE VOL, celui que l'on n''oubliera pas car unique certainement. En outre, il fait beau et la mer est calme. Lorsque nous appontons, le navire a quitté l'Atlantique et navigue désormais dans le Pacifique...
[...]
Concernant les suites de la main au panier du pacha : j'ai croisé, voire dîné avec le pacha à plusieurs reprises dans les jours qui ont suivi l'incident : à aucun moment il n'y fit allusion. Il fallut attendre le 19 février, à la veille d'accoster à TAHITI (escale où eut lieu une relève partielle des personnels du DETALAT, à mi-parcours de la campagne. C'était donc mon dernier jour de mer à bord de la Jeanne). Ce soir-là, un dîner officiel fut organisé au carré des officiers subalternes, réunissant tous les officiers du bord, y compris le pacha, mais aussi l'amiral commandant les forces du Pacifique. Pendant le repas, ce dernier voulut connaître les impressions des officiers du DETALAT, qui venaient d''accomplir la première partie de cette première campagne de la Jeanne avec un détachement ALAT à bord. Évidemment, lorsque vint mon tour, et alors que je faisais une réponse "TTA", tous mes camarades ont lourdement insisté pour que je raconte "autre chose". Je compris vite où ils voulaient en venir. Je me tournai donc vers le pacha qui, tout sourire, me dit : "Allez-y, BIBARD, racontez-nous ça, je suis impatient de connaître votre version des faits !". Ce que je fis. Hilarité générale, pacha et ALPACI compris ! Comme je le dis plus haut dans cet article, cette histoire fit le tour du bateau, et fut racontée plusieurs années durant à bord, à chaque fois qu'un détachement ALAT y séjournait, avec moult fioritures, déformations, exagérations propres à toutes les histoires de ce genre ! Ce qui me valut d'ailleurs de la raconter à nouveau, alors que j'effectuais une campagne d'appontages sur la Jeanne 2 ans plus tard, à des officiers de Marine ébahis qui avaient devant eux le "coupable", afin de rétablir quelques vérités...
Samedi 23 janvier 1993 - 47e jour
Attention, cette journée est historique : pour la première fois, un détachement ALAT va franchir le Cap Horn... et a priori en hélico !
Ce matin, à 7h, il fait 7° C. L'eau est à 8° C. Nous passons entre la Terre de feu à tribord et l'île des États à babord. D'ailleurs, vers 7h30, je sors faire quelques images... Il ne fait pas chaud du tout ! On supporte aisément le k-way fourré ! Je fais d'autres images, vers 8h, de l'intérieur cette fois.
Je vole à 11h. À 10h, donc, je monte en salle de contrôle des opérations (le CO) pour le briefing avant vol. Ce briefing est destiné à nous donner tous les éléments de la mission aérienne : fréquences, indicatifs, éléments météo, consignes et conduites à tenir... Ça dure entre 10 et 20 minutes, selon la mission. Dans cette salle, il fait sombre, avec un éclairage rouge caractéristique, et il est difficile d'identifier quelqu'un, sinon de très près. Avant de quitter le CO, je crois reconnaître le LV M. (un officier que je connais depuis la corniche, à Saint-Cyr-l’École), occupé à faire travailler quelques "Midships" (les élèves-officiers de Marine). En passant derrière lui, je lui mets une main amicale mais ferme au "panier". Je m'éloigne un peu, tout sourire, et en ouvrant la porte du CO, je me retourne pour voir la réaction de mon camarade. Horreur ! Ce n'est pas lui... Mais le pacha en personne ! Je me répands en excuses plus ou moins bafouillées auprès du commandant, qui semble rester de marbre. Je referme la porte, rejoins la salle d'alerte des pilotes. Quand j'y pénètre, tous ceux qui sont présents comprennent qu'il vient de m'arriver un "truc". À la question qui fuse alors : "Qu'est-ce qui vous arrive, Mon capitaine ?", je réponds spontanément : "Je viens de mettre la main au c... du pacha !". Hilarité générale, évidemment. Le seul qui ne rit pas, c'est moi.
Bref, le vol a lieu comme prévu. Il s'agit d'un ADEX (exercice de défense anti-aérienne), où les deux GAZELLE jouent le rôle, dans un premier temps d'avions en attaque contre le navire, dans un deuxième temps de missiles tirés depuis un navire ou un avion ennemi (véridique !). Ça dure une bonne heure. Quand je pose sur le pont de la Jeanne, ma "mésaventure" au CO a déjà fait le tour du navire...
À 13h "O", nous reculons nos montres d''une heure : il est donc de nouveau midi ("P") !
Après le repas, je monte à nouveau en passerelle. Le Cap Horn se rapproche... 13h45, poste de combat, pendant une heure. Je descends en cabine pour revêtir ma combinaison étanche. À 15h45, je décolle à bord de la GAZELLE SA342 n° 3948, immatriculée FMCYI. La Jeanne est en train de franchir le Cap Horn lorsque je décolle les patins du pont. Pendant 45 minutes, je vais passer et repasser ce cap mythique, le photographiant et le filmant sous tous les angles. C'est LE VOL, celui que l'on n''oubliera pas car unique certainement. En outre, il fait beau et la mer est calme. Lorsque nous appontons, le navire a quitté l'Atlantique et navigue désormais dans le Pacifique...
[...]
Concernant les suites de la main au panier du pacha : j'ai croisé, voire dîné avec le pacha à plusieurs reprises dans les jours qui ont suivi l'incident : à aucun moment il n'y fit allusion. Il fallut attendre le 19 février, à la veille d'accoster à TAHITI (escale où eut lieu une relève partielle des personnels du DETALAT, à mi-parcours de la campagne. C'était donc mon dernier jour de mer à bord de la Jeanne). Ce soir-là, un dîner officiel fut organisé au carré des officiers subalternes, réunissant tous les officiers du bord, y compris le pacha, mais aussi l'amiral commandant les forces du Pacifique. Pendant le repas, ce dernier voulut connaître les impressions des officiers du DETALAT, qui venaient d''accomplir la première partie de cette première campagne de la Jeanne avec un détachement ALAT à bord. Évidemment, lorsque vint mon tour, et alors que je faisais une réponse "TTA", tous mes camarades ont lourdement insisté pour que je raconte "autre chose". Je compris vite où ils voulaient en venir. Je me tournai donc vers le pacha qui, tout sourire, me dit : "Allez-y, BIBARD, racontez-nous ça, je suis impatient de connaître votre version des faits !". Ce que je fis. Hilarité générale, pacha et ALPACI compris ! Comme je le dis plus haut dans cet article, cette histoire fit le tour du bateau, et fut racontée plusieurs années durant à bord, à chaque fois qu'un détachement ALAT y séjournait, avec moult fioritures, déformations, exagérations propres à toutes les histoires de ce genre ! Ce qui me valut d'ailleurs de la raconter à nouveau, alors que j'effectuais une campagne d'appontages sur la Jeanne 2 ans plus tard, à des officiers de Marine ébahis qui avaient devant eux le "coupable", afin de rétablir quelques vérités...