OPÉRATION THALATINE
DU DETALAT DE LA JEANNE D'ARC DU
15 DÉCEMBRE 2007 AU 04 JUIN 2008
L’opération "Thalatine" racontée par le chef du DETALAT Jeanne d’Arc.
Une rumeur court à bord… un bateau de croisière a été piraté.
Lundi 7 avril 2008 :
22:30 : la Jeanne d’Arc arrive sur la zone d’action.
23:00 : prise de l’alerte 15’ par la patrouille GAZELLE en vue d’appuyer un éventuel assaut d’urgence du Ponant par les forces spéciales (GIGN et commando HUBERT).
Peu de renseignements à ce moment sur la menace réelle et les modes opératoires envisagés par les forces spéciales pour reprendre le Ponant, nous nous préparons à tout.
Mardi 8 avril 2008 :
05:30 : fin de l’alerte 15’. Les équipages se reposent en alerte à 45’, prise d’alerte par les ALOUETTE III.
Une première nuit passée éveillés en salle d’alerte, je sais que si la mission doit durer comme l’expérience des précédentes prises d’otages le laisse présager, la gestion de l’attente et de la fatigue seront difficiles et déterminantes, ce régime d’alerte étant nouveau pour les équipages de l’ALAT qui ne procèdent pas de la même manière en opérations extérieures.
17:30 : passage en alerte 15’ pour la nuit.
21:00 : la patrouille se prépare à appuyer une reconnaissance du Ponant par les nageurs de combat à compter de 00:00.
Quand le commandant me demande si je suis en mesure de réaliser la mission sans avoir encore reçu la dérogation d’embarquer un tireur d’élite par le COMALAT, je n’hésite pas une seconde, j’ai depuis le départ de la campagne acquis une entière confiance en mon chef.
21:30 : Une ALOUETTE III part sur le Var et ramène un tireur d’élite du GIGN et un coordinateur du commando HUBERT sur la Jeanne d’Arc en vue d’un éventuel engagement si prise à partie des nageurs de combat par les pirates. La GAZELLE lisse passe en configuration TE (tireur d’élite, implique la dépose des portes de la GAZELLE).
La réactivité de mes techniciens pour passer la GAZELLE lisse en version TE me rassure, ils sont eux aussi pleinement dans la mission.
22:30 : après briefing procédures, les équipages passent en alerte 15’ jusqu’à la fin de la mission.
Mercredi 9 avril 2008 :
05:00 : fin de la mission de reconnaissance par les nageurs de combat.
05:30 : fin de l’alerte 15’. Les équipages se reposent et passent en alerte à 45’.
Premier contact direct avec des membres des forces spéciales, il est toujours important de rencontrer les personnes avec qui nous sommes susceptibles d’aller au feu. Le contact passe très bien entre eux et nous.
15:00 : décollage de la patrouille pour une séance d’entraînement appontage sur la Jeanne d’Arc afin d’occuper les équipages et de vérifier le bon fonctionnement des GAZELLE.
Ce vol est important, car il permet d’occuper pilotes et techniciens. Effectuer des opérations "basiques" après trois jours à imaginer tous les scénarios d’engagement possibles (et notamment les pires) permet de relativiser.
17:30 : passage en alerte 45’ pour la nuit. Les négociations sont en passe d’aboutir pour la libération des otages. Les équipages se reposent en vue d’un engagement.
Difficile de trouver le sommeil bien que nous soyons autorisés à dormir.
Jeudi 10 avril 2008 :
02:30 : réception de l’ordre d’opération en vue d’une libération des otages puis de l’exécution de mesures de représailles chez les pirates.
Définitions des missions des hélicoptères :
GAZELLE VIVIANE : armée de 4 missiles HOT en vue de la destruction de tout objectif.
GAZELLE lisse : embarquement de 2 journalistes de l’ECPAD pour couverture médiatique de l’opération.
ALOUETTE III : appui feu avec TE.
ALOUETTE III : en alerte RESCO et EVASAN .
Début d’action prévu à 09:00, prise d’alerte 5’ prévue à 08:55.
Mon adjoint et moi en prenons tout de suite connaissance et commençons à appréhender de manière plus concrète quel type d’action nous allons mener. Nous y sommes préparés, c’est le genre de mission pour lequel nous nous entraînons toute l’année. J’avoue avoir un moment de déception de ne pas embarquer de tireur d’élite, c’est comme ça, on ne choisit pas sa mission. Ce sentiment passe vite.
06:00 : le PANTHER de la frégate Jean Bart dépose à bord de la Jeanne d’Arc le tireur d’élite du commando HUBERT et les deux journalistes de l’ECPAD.
Après la communication de l’opération au reste de l’équipage alors que nous prenons le petit déjeuner au carré, nous sentons dans le regard de nos camarades à la fois une grande envie et une certaine admiration qui ajoute à notre confiance et à notre volonté de ne pas décevoir tous ceux qui resteront un peu à distance de l’action éventuelle… "En être, sans en être", j’ai déjà connu ça par le passé et en connais les conséquences… Cette fois je sens bien que "j’en suis".
07:00 : briefing de l’opération par le COMOPS.
07:15 : montage des 4 missiles HOT sur GAZELLE VIVIANE et des leurres IR sur les 2 GAZELLE (très peu de renseignement sur la menace anti-aérienne).
07:30 : briefing des équipages.
Le processus de libération rencontre plusieurs difficultés, la mission est retardée de 2 heures.
10:30 : la mission est gelée jusqu’à nouvel ordre, reprise d’une alerte 45’.
13:00 : la mission est reportée au 11 avril à 09:00. Les GAZELLE sont désarmées, les équipages profitent de l’après-midi pour affiner les procédures, et de la soirée pour se reposer.
Une journée de montée en tension qui certes n’a pas été ponctuée par l’action mais a été très bénéfique pour la confiance de tout le monde : le bord est prêt comme nous et sait maintenant à quoi s’attendre. Il va maintenant falloir gérer l’attente, car le Surcouf arrive dans deux jours et nous pensons que le commandement attendra son arrivée pour engager la libération.
Vendredi 11 avril :
GAZELLE VIVIANE HOT (LTN Nicolas J. - ADJ Éric A.) : indicatif GRIFFON 1 ;
GAZELLE lisse (CNE HUMBERT - MDL Guillaume C.) : indicatif GRIFFON 2 ;
ALOUETTE III TE: indicatif VEGA S ;
ALOUETTE III EVASAN: indicatif VEGA T ;
ALOUETTE III du Var : indicatif VEGA Q ;
PANTHER du Jean Bart : indicatif HELIOS ;
ATLANTIQUE 2 de Djibouti : indicatif PELICAN C.
01:30 : réception du nouvel ordre d’opération, action prévue ce jour à 09:00. Missions inchangées pour les GAZELLE mais avec un esprit moins coercitif que la veille (plus de mesures de rétorsion à terre, autorisation d’ouvrir le feu sur ordre sur des objectifs en mer).
07:00 : poste aviation, le processus de libération des otages a été enclenché.
07:30 : briefing de l’opération par le COMOPS.
08:55 : prise de l’alerte 5’. Le processus de libération des otages connaît plusieurs difficultés qui sont gérées en conduite et aboutit à la libération des otages à 11:55.
L’attente, ce qu’il y a de pire au combat.
12:05 : décollage de tous les hélicoptères vers la zone d’action.
Les 2 GAZELLE et les 2 ALOUETTE III TE se mettent en zone d’attente à 2 Nm à l’est du Ponant, prêts à intervenir sur les preneurs d’otages.
L’action, enfin !
12:35 : avortement de la mission, la situation est trop confuse pour pouvoir intervenir sur les ravisseurs. Le dispositif aérien est désengagé, retour des hélicoptères sur leurs bâtiments respectifs et prise d’alerte 15’. PELICAN C piste la rançon dans le village des pirates. GRIFFON 2 reste faire des prises de vue au contact du Ponant.
Je vais contenter mes journalistes et me rapprocher du Ponant. Je garde quand même un œil très attentif sur tous les skiffs et boutres qui évoluent un peu partout autour de nous, il serait dommage de prendre une rafale maintenant !
13:10 : retour de GRIFFON 2 sur la Jeanne d’Arc, prise d’alerte 15’.
À ce moment, j’ai pensé que le plus gros de l’opération était terminé puisque les otages étaient sains et saufs.
13:40 : reprise d’une alerte 5’.
14:00 : décollage des GRIFFON et VEGA S vers une zone d’attente à 2 Nm à l’est du village des pirates, en attente d’ordres.
14:15 : décollage de VEGA T qui rejoint la zone d’attente.
J’ai ressenti un grand soulagement de savoir que "l’ambulance" n’était pas loin.
14:20 : ordre de l’amiral, commandant l’opération : une formation composée de tous les hélicoptères de la force sera guidée par PELICAN C vers un objectif terrestre où se trouvent des pirates et une partie de la rançon afin de les neutraliser. HELIOS prend le commandement de la formation, cap au 270° pour 11 Nm à l’intérieur des terres vers un pick-up noir évoluant vers l’ouest sur une piste dans le désert somalien. Nature, volume et armement de l’ennemi inconnus. La formation se déploie en ligne, les hélicoptères espacés de 1000 m, à une altitude de 2000 ft, avec, du nord au sud, GRIFFON 2, GRIFFON 1, HELIOS, VEGA S, VEGA Q et VEGA T en retrait.
Passant le trait de côte, je me dis "c’est maintenant que ça devient dangereux".
14:33 : GRIFFON 2 a repéré la cible et est en train de passer vertical. Il rend compte à HELIOS, se fait confirmer la position par PELICAN C, puis quitte la formation pour marquer l’objectif et rester au contact, le reste de la patrouille ayant continué vers l’ouest.
Je n’espère qu’une chose : ne pas m’être trompé d’objectif ! je suis vite convaincu en descendant sur eux.
14:37 : après avoir fait demi-tour, la formation arrive sur l’objectif, HELIOS répartit les missions :
14:48 : PELICAN C annonce 2 pick-up en sortie de village progressant vers l’ouest sur la même piste, VEGA T part reconnaître la piste pour prendre contact.
Sur la fréquence interne patrouille, je donne la mission à mon ailier (la GAZELLE VIVIANE) de renseigner sur cet objectif.
14:53 : fin de la fouille, les pirates et deux sacs contenant une partie de la rançon sont embarqués à bord des hélicoptères (2 dans HELIOS, 2 dans VEGA S, et 2 dans VEGA Q)
GRIFFON 1 est en mesure de traiter le véhicule des pirates après exfiltration des prisonniers. Autorisation de détruire le pick-up accordée par l’amiral après s’être assuré que le véhicule est vide.
De l’audace, encore de l’audace !
14:56 : décollage des hélicoptères avec les prisonniers vers le Jean Bart pour prise en compte par le GIGN.
GRIFFON 1 se positionne à 2000 m au nord de la cible, GRIFFON 2 en arrière pour prise de vue et couverture face à l’ouest.
Moment de tension pour vite détruire le véhicule et s’exfiltrer… une GAZELLE en stationnaire est toujours une cible potentielle, alors deux…
15:00 : GRIFFON 1 tire un missile HOT et fait but, la patrouille passe vertical l’objectif, confirme la destruction totale du pick-up puis fait cap à l’est pour exfiltration vers la Jeanne d’Arc.
15:05 : VEGA T rejoint la patrouille GRIFFON cap au 090°, altitude 2000 ft.
J’avoue ne pas être très à l’aise de survoler la Somalie à 60 kt alors qu’on pourrait aller à 120 kt ! j’ai un réel soulagement en repassant le trait de côte.
15:20 : GRIFFON 2 est autorisé à quitter la formation pour aller faire des prises de vue du Ponant partant vers le large escorté par le Cdt Bouan.
15:30 : appontage de GRIFFON 1, VEGA S et VEGA T sur la Jeanne d’Arc.
16:00 : appontage de GRIFFON 2 sur la Jeanne d’Arc, fin de mission.
Après l’action, nous avons une réelle fierté d’avoir pris part jusqu’au bout à l’opération et d’avoir contribué à son dénouement heureux. Elle est un aboutissement de notre entraînement quotidien et nous conforte simplement dans notre choix de vie. Surtout, nous ressentons un vrai plaisir de l’avoir vécu et partagé de bout en bout avec les équipages de la 22S et avec tous les échelons de commandement qui ont été en tout point exemplaires.
Remerciements : capitaine HUMBERT.
Une rumeur court à bord… un bateau de croisière a été piraté.
Lundi 7 avril 2008 :
22:30 : la Jeanne d’Arc arrive sur la zone d’action.
23:00 : prise de l’alerte 15’ par la patrouille GAZELLE en vue d’appuyer un éventuel assaut d’urgence du Ponant par les forces spéciales (GIGN et commando HUBERT).
Peu de renseignements à ce moment sur la menace réelle et les modes opératoires envisagés par les forces spéciales pour reprendre le Ponant, nous nous préparons à tout.
Mardi 8 avril 2008 :
05:30 : fin de l’alerte 15’. Les équipages se reposent en alerte à 45’, prise d’alerte par les ALOUETTE III.
Une première nuit passée éveillés en salle d’alerte, je sais que si la mission doit durer comme l’expérience des précédentes prises d’otages le laisse présager, la gestion de l’attente et de la fatigue seront difficiles et déterminantes, ce régime d’alerte étant nouveau pour les équipages de l’ALAT qui ne procèdent pas de la même manière en opérations extérieures.
17:30 : passage en alerte 15’ pour la nuit.
21:00 : la patrouille se prépare à appuyer une reconnaissance du Ponant par les nageurs de combat à compter de 00:00.
Quand le commandant me demande si je suis en mesure de réaliser la mission sans avoir encore reçu la dérogation d’embarquer un tireur d’élite par le COMALAT, je n’hésite pas une seconde, j’ai depuis le départ de la campagne acquis une entière confiance en mon chef.
21:30 : Une ALOUETTE III part sur le Var et ramène un tireur d’élite du GIGN et un coordinateur du commando HUBERT sur la Jeanne d’Arc en vue d’un éventuel engagement si prise à partie des nageurs de combat par les pirates. La GAZELLE lisse passe en configuration TE (tireur d’élite, implique la dépose des portes de la GAZELLE).
La réactivité de mes techniciens pour passer la GAZELLE lisse en version TE me rassure, ils sont eux aussi pleinement dans la mission.
22:30 : après briefing procédures, les équipages passent en alerte 15’ jusqu’à la fin de la mission.
Mercredi 9 avril 2008 :
05:00 : fin de la mission de reconnaissance par les nageurs de combat.
05:30 : fin de l’alerte 15’. Les équipages se reposent et passent en alerte à 45’.
Premier contact direct avec des membres des forces spéciales, il est toujours important de rencontrer les personnes avec qui nous sommes susceptibles d’aller au feu. Le contact passe très bien entre eux et nous.
15:00 : décollage de la patrouille pour une séance d’entraînement appontage sur la Jeanne d’Arc afin d’occuper les équipages et de vérifier le bon fonctionnement des GAZELLE.
Ce vol est important, car il permet d’occuper pilotes et techniciens. Effectuer des opérations "basiques" après trois jours à imaginer tous les scénarios d’engagement possibles (et notamment les pires) permet de relativiser.
17:30 : passage en alerte 45’ pour la nuit. Les négociations sont en passe d’aboutir pour la libération des otages. Les équipages se reposent en vue d’un engagement.
Difficile de trouver le sommeil bien que nous soyons autorisés à dormir.
Jeudi 10 avril 2008 :
02:30 : réception de l’ordre d’opération en vue d’une libération des otages puis de l’exécution de mesures de représailles chez les pirates.
Définitions des missions des hélicoptères :
GAZELLE VIVIANE : armée de 4 missiles HOT en vue de la destruction de tout objectif.
GAZELLE lisse : embarquement de 2 journalistes de l’ECPAD pour couverture médiatique de l’opération.
ALOUETTE III : appui feu avec TE.
ALOUETTE III : en alerte RESCO et EVASAN .
Début d’action prévu à 09:00, prise d’alerte 5’ prévue à 08:55.
Mon adjoint et moi en prenons tout de suite connaissance et commençons à appréhender de manière plus concrète quel type d’action nous allons mener. Nous y sommes préparés, c’est le genre de mission pour lequel nous nous entraînons toute l’année. J’avoue avoir un moment de déception de ne pas embarquer de tireur d’élite, c’est comme ça, on ne choisit pas sa mission. Ce sentiment passe vite.
06:00 : le PANTHER de la frégate Jean Bart dépose à bord de la Jeanne d’Arc le tireur d’élite du commando HUBERT et les deux journalistes de l’ECPAD.
Après la communication de l’opération au reste de l’équipage alors que nous prenons le petit déjeuner au carré, nous sentons dans le regard de nos camarades à la fois une grande envie et une certaine admiration qui ajoute à notre confiance et à notre volonté de ne pas décevoir tous ceux qui resteront un peu à distance de l’action éventuelle… "En être, sans en être", j’ai déjà connu ça par le passé et en connais les conséquences… Cette fois je sens bien que "j’en suis".
07:00 : briefing de l’opération par le COMOPS.
07:15 : montage des 4 missiles HOT sur GAZELLE VIVIANE et des leurres IR sur les 2 GAZELLE (très peu de renseignement sur la menace anti-aérienne).
07:30 : briefing des équipages.
Le processus de libération rencontre plusieurs difficultés, la mission est retardée de 2 heures.
10:30 : la mission est gelée jusqu’à nouvel ordre, reprise d’une alerte 45’.
13:00 : la mission est reportée au 11 avril à 09:00. Les GAZELLE sont désarmées, les équipages profitent de l’après-midi pour affiner les procédures, et de la soirée pour se reposer.
Une journée de montée en tension qui certes n’a pas été ponctuée par l’action mais a été très bénéfique pour la confiance de tout le monde : le bord est prêt comme nous et sait maintenant à quoi s’attendre. Il va maintenant falloir gérer l’attente, car le Surcouf arrive dans deux jours et nous pensons que le commandement attendra son arrivée pour engager la libération.
Vendredi 11 avril :
GAZELLE VIVIANE HOT (LTN Nicolas J. - ADJ Éric A.) : indicatif GRIFFON 1 ;
GAZELLE lisse (CNE HUMBERT - MDL Guillaume C.) : indicatif GRIFFON 2 ;
ALOUETTE III TE: indicatif VEGA S ;
ALOUETTE III EVASAN: indicatif VEGA T ;
ALOUETTE III du Var : indicatif VEGA Q ;
PANTHER du Jean Bart : indicatif HELIOS ;
ATLANTIQUE 2 de Djibouti : indicatif PELICAN C.
01:30 : réception du nouvel ordre d’opération, action prévue ce jour à 09:00. Missions inchangées pour les GAZELLE mais avec un esprit moins coercitif que la veille (plus de mesures de rétorsion à terre, autorisation d’ouvrir le feu sur ordre sur des objectifs en mer).
07:00 : poste aviation, le processus de libération des otages a été enclenché.
07:30 : briefing de l’opération par le COMOPS.
08:55 : prise de l’alerte 5’. Le processus de libération des otages connaît plusieurs difficultés qui sont gérées en conduite et aboutit à la libération des otages à 11:55.
L’attente, ce qu’il y a de pire au combat.
12:05 : décollage de tous les hélicoptères vers la zone d’action.
Les 2 GAZELLE et les 2 ALOUETTE III TE se mettent en zone d’attente à 2 Nm à l’est du Ponant, prêts à intervenir sur les preneurs d’otages.
L’action, enfin !
12:35 : avortement de la mission, la situation est trop confuse pour pouvoir intervenir sur les ravisseurs. Le dispositif aérien est désengagé, retour des hélicoptères sur leurs bâtiments respectifs et prise d’alerte 15’. PELICAN C piste la rançon dans le village des pirates. GRIFFON 2 reste faire des prises de vue au contact du Ponant.
Je vais contenter mes journalistes et me rapprocher du Ponant. Je garde quand même un œil très attentif sur tous les skiffs et boutres qui évoluent un peu partout autour de nous, il serait dommage de prendre une rafale maintenant !
13:10 : retour de GRIFFON 2 sur la Jeanne d’Arc, prise d’alerte 15’.
À ce moment, j’ai pensé que le plus gros de l’opération était terminé puisque les otages étaient sains et saufs.
13:40 : reprise d’une alerte 5’.
14:00 : décollage des GRIFFON et VEGA S vers une zone d’attente à 2 Nm à l’est du village des pirates, en attente d’ordres.
14:15 : décollage de VEGA T qui rejoint la zone d’attente.
J’ai ressenti un grand soulagement de savoir que "l’ambulance" n’était pas loin.
14:20 : ordre de l’amiral, commandant l’opération : une formation composée de tous les hélicoptères de la force sera guidée par PELICAN C vers un objectif terrestre où se trouvent des pirates et une partie de la rançon afin de les neutraliser. HELIOS prend le commandement de la formation, cap au 270° pour 11 Nm à l’intérieur des terres vers un pick-up noir évoluant vers l’ouest sur une piste dans le désert somalien. Nature, volume et armement de l’ennemi inconnus. La formation se déploie en ligne, les hélicoptères espacés de 1000 m, à une altitude de 2000 ft, avec, du nord au sud, GRIFFON 2, GRIFFON 1, HELIOS, VEGA S, VEGA Q et VEGA T en retrait.
Passant le trait de côte, je me dis "c’est maintenant que ça devient dangereux".
14:33 : GRIFFON 2 a repéré la cible et est en train de passer vertical. Il rend compte à HELIOS, se fait confirmer la position par PELICAN C, puis quitte la formation pour marquer l’objectif et rester au contact, le reste de la patrouille ayant continué vers l’ouest.
Je n’espère qu’une chose : ne pas m’être trompé d’objectif ! je suis vite convaincu en descendant sur eux.
14:37 : après avoir fait demi-tour, la formation arrive sur l’objectif, HELIOS répartit les missions :
- VEGA S et VEGA Q : se placer de part et d’autre du pick-up et stopper le véhicule par des tirs de sommation des TE,
- GRIFFON 1 : couvrir face à l’est et au sud,
- GRIFFON 2 : couvrir face à l’ouest et au nord, assurer des prises de vue au plus près de l’action,
- HELIOS : débarquer ses 3 commandos pour contact avec ennemi et capture de prisonniers,
- VEGA T : EVASAN.
14:48 : PELICAN C annonce 2 pick-up en sortie de village progressant vers l’ouest sur la même piste, VEGA T part reconnaître la piste pour prendre contact.
Sur la fréquence interne patrouille, je donne la mission à mon ailier (la GAZELLE VIVIANE) de renseigner sur cet objectif.
14:53 : fin de la fouille, les pirates et deux sacs contenant une partie de la rançon sont embarqués à bord des hélicoptères (2 dans HELIOS, 2 dans VEGA S, et 2 dans VEGA Q)
GRIFFON 1 est en mesure de traiter le véhicule des pirates après exfiltration des prisonniers. Autorisation de détruire le pick-up accordée par l’amiral après s’être assuré que le véhicule est vide.
De l’audace, encore de l’audace !
14:56 : décollage des hélicoptères avec les prisonniers vers le Jean Bart pour prise en compte par le GIGN.
GRIFFON 1 se positionne à 2000 m au nord de la cible, GRIFFON 2 en arrière pour prise de vue et couverture face à l’ouest.
Moment de tension pour vite détruire le véhicule et s’exfiltrer… une GAZELLE en stationnaire est toujours une cible potentielle, alors deux…
15:00 : GRIFFON 1 tire un missile HOT et fait but, la patrouille passe vertical l’objectif, confirme la destruction totale du pick-up puis fait cap à l’est pour exfiltration vers la Jeanne d’Arc.
15:05 : VEGA T rejoint la patrouille GRIFFON cap au 090°, altitude 2000 ft.
J’avoue ne pas être très à l’aise de survoler la Somalie à 60 kt alors qu’on pourrait aller à 120 kt ! j’ai un réel soulagement en repassant le trait de côte.
15:20 : GRIFFON 2 est autorisé à quitter la formation pour aller faire des prises de vue du Ponant partant vers le large escorté par le Cdt Bouan.
15:30 : appontage de GRIFFON 1, VEGA S et VEGA T sur la Jeanne d’Arc.
16:00 : appontage de GRIFFON 2 sur la Jeanne d’Arc, fin de mission.
Après l’action, nous avons une réelle fierté d’avoir pris part jusqu’au bout à l’opération et d’avoir contribué à son dénouement heureux. Elle est un aboutissement de notre entraînement quotidien et nous conforte simplement dans notre choix de vie. Surtout, nous ressentons un vrai plaisir de l’avoir vécu et partagé de bout en bout avec les équipages de la 22S et avec tous les échelons de commandement qui ont été en tout point exemplaires.
Remerciements : capitaine HUMBERT.
Avril 2008, GAZELLE survolant la Jeanne D'Arc. À droite, GAZELLE HOT codée CWT (photos Guillaume HUMBERT).
Avril 2008, GAZELLE HOT codée CWT. À droite, GAZELLE lors de la mise en place pour l'intervention (photos Guillaume HUMBERT).