CENTRE DE FORMATION DES SECTIONS D'OBSERVATION DE L'AVIATION D'ARTILLERIE
(CFSOAA)
Après le débarquement allié, le 8 novembre 1942, les américains livrent du matériel nécessaire pour équiper les forces françaises rassemblées en Afrique du Nord et destinées à participer aux opérations en Europe. Ces unités sont donc entièrement réorganisées et équipées sur le modèle américain. C'est ainsi que l'artillerie de campagne est dotée d'avions légers d'observation PIPER-CUB, répartis par section de deux appareils dans chaque groupe ou état-major de groupement ou d'artillerie divisionnaire. Chaque section comprend deux appareils L-4B ou L-4H, deux pilotes et un mécanicien de l'armée de l'Air, un sous-officier radio, un aide-mécanicien, un radio européen, trois chauffeurs indigènes de l'Artillerie, une Jeep et une camionnette Dodge ou un camion GMC.
Cela pose évidemment le problème de la formation du personnel de cette nouvelle branche de l'armée française. L'armée de Terre n'ayant ni pilotes, ni mécaniciens, elle doit faire appel, dans un premier temps, à l'armée de l'Air. Quelques observateurs sont cependant issus de l'armée de Terre, un embryon de pilotes d'autogyre ou d'observateurs en ballon ayant été formés avant 1939 les rejoint. Tout le personnel navigant effectue sa formation au centre d'entraînement de Noisy-les-Bains, près de Mostaganem, avant d'être affecté dans les groupes où ils constituent des sections d'observation d'aviation d'artillerie (SOAA). En octobre 1943, le centre de formation des sections d'observation de l'aviation d'artillerie (CFSOAA) est créé à Oran, il se déplace sur Lourmel, à l'ouest d'Oran, en décembre 1943. À partir de février 1944, le personnel navigant est instruit dans ce centre et faute de personnel disponible dans l'armée de l'Air, de très nombreux "biffins", fanas d'aviation ou titulaires de brevets civils viennent s'y former. Son commandant est le capitaine MARIN, originaire de l'armée de l'Air, surnommé "Marin la poussière" pour ses atterrissages en bonds successifs sur la piste en terre battue. Le centre reçoit par série de douze les officiers et sous-officiers de l'armée de Terre titulaires, si possible, du brevet de pilote civil, ainsi que des mécaniciens auto appelés à être transformés sur avions. Les moniteurs sont tous d'anciens pilotes de chasse arrivés là, soit par sanction disciplinaire, ou pour motif médical. Il y a notamment le sergent PIMONT, un aviateur, qui a descendu deux avions anglais en Syrie, le sergent-chef CROS, ancien pilote d'Airacobra P-39. L'adjudant-chef MALADIÈRE en est le chef-mécanicien (par jeu de mot, il était affublé du surnom de "malade aujourd'hui". Les observateurs sont formés par le capitaine artilleur DAVID sur PIPER. Les stagiaires reçoivent à leur arrivée le sobriquet de "Pèlerin" pour les élèves pilotes ou de "Crasseux" pour les élèves mécaniciens. Le centre devient école de l'aviation d'artillerie (EAA) le 1er septembre 1944. Il est transféré sur le terrain de Cannes-Mandelieu le 6 janvier 1945 (1). Organe territorial rattaché directement au 3e bureau de l'état-major général guerre, Il comprend cependant du personnel de l'armée de l'Air. Après avoir remonté ses neuf PIPER L-4, le premier vol sur le territoire français a lieu le 20 mars 1945. En juillet 1945, il dispose de neuf PIPER L-4, de deux MORANE 500 et d'un AUTOGYRE. Commandée par un officier d'artillerie, le capitaine DONZE, à sa dissolution, en octobre 1945, ses personnel et matériels sont alors dirigés sur Finthen en Allemagne, au cours pratique d'observation aérienne (CPOA). Le centre n'aura jamais eu un grand rendement, l'armée de Terre, comme l'armée de l'Air, ne lui portant qu'un intérêt restreint. L'organisation du commandement, à cette époque, ne comportait d'ailleurs aucun chef d'artillerie nanti de l'autorité suffisante pour traiter ces questions au nom de l'ensemble de l'arme, comme l'avaient fait avant 1939 les généraux s'étant succédé au poste d'inspecteur général de l'Artillerie. Dans la majorité des cas, on confia donc l'encadrement des sections d'observation aérienne d'artillerie à du personnel de l'armée de l'Air, placé pour l'emploi à l'entière disposition des chefs d'artillerie. Depuis sa création, l'école a accumulé plus de 10 000 heures de vol, avec une moyenne de huit appareils (trois au début), et délivré plus de 150 brevets de pilotes, sans compter la formation des personnels de l'armée de l'Air, déjà brevetés, venus reprendre leur entraînement. De plus, elle a délivré 120 brevets de mécanicien. (1) Note de service n° 2806-EMGG du 29 décembre 1944. Remerciements pour l'aide apportée par Pierre JARRIGE. |
Lourmel en mai 1944. Le hangar du CFSOAA et le parking des avions (photos © ECPAD, collection Marc BONAS).
Lourmel en mai 1944. PIPER L-4A du CFSOAA au démarrage avec à sa droite un des AERONCA L-3 ; à noter que les avions portent encore l'étoile US. À droite, ravitaillement en carburant d'un L-4 (photos © ECPAD, collection Marc BONAS).
Les mécaniciens s'activent à sortir de caisse un PIPER L-4 série 43-29911 baptisé "Jeannot" arrivé des États-Unis via la base de transit d'Oran-la-Sénia (photos © ECPAD, collection Marc BONAS).
Les élèves mécaniciens s'initient au démontage et au remontage du moteur Continental. À droite, point fixe du L-4 n° 903, un élève du CFSOAA s'apprête à décoller, son moniteur en place arrière est un capitaine, ancien du CEF d'Italie. À noter, les cocardes américaines sous l'aile et françaises sur le fuselage (photos X, via Pierre JARRIGE).
Le parking de Lourmel en 1944, vu sous deux angles différents (photos © ECPAD, collection Marc BONAS).
Retour d'un vol d'instruction du L-4A n° 43-29241, qui survole le terrain de Lourmel, immense losange aride, boueux l'hiver et chaud l'été. À droite, pause café avec les mécaniciens (photos X, via Pierre JARRIGE).
PIPER-JOURNAL : organe du CFSOAA, puis de l’EAA. 13 numéros, de juin 1944 à août 1945 (photo, via Pierre JARRIGE).